Rencontre avec Florent Barichard au Domaine des Terres d’Ocre (AOC St-Pourçain)

Florent Barichard-Vigneron au domaine des Terres d'ocre

Jeune vigneron plein d’énergie et d’enthousiasme, Florent Barichard nous a reçus dans le domaine familial des Terres d’Ocre qu’il dirige en association avec son oncle et sa tante, Éric et Valérie Nesson.

Si l’appellation Saint-Pourçain ne vous évoque rien, attendez-vous pourtant à en entendre parler de plus en plus souvent. Car si cette AOC d’Auvergne est plutôt méconnue, elle n’en recèle pas moins des domaines remarquables dont les vignerons ont entrepris depuis quelques années une démarche qualitative qui porte ses fruits.

En effet, comme dans d’autres régions viticoles françaises peu médiatisées, ces hommes et femmes ont compris la nécessité de se distinguer par la qualité de leurs produits et la mise en avant d’un terroir riche et original qui ne demandait qu’à être révélé aux amateurs de vins, sans cesse à la recherche de nouveautés et de découvertes.
Ce mouvement est très bien incarné par des noms comme le « Domaine Grosbot-Barbara » (précurseur en la matière), ou encore le « Domaine des Bérioles », et bien entendu le « Domaine des Terres d’Ocre ».

Domaine Les Terres d'ocre

Bienvenue au domaine !

Un parcours de globe-trotter

Situé à Châtel de Neuvre, au cœur de l’Allier, au lieu-dit « les Gravoches », le domaine des Terres d’Ocre a été créé en 2013 lorsque Florent Barichard s’associe avec son oncle et sa tante, eux-mêmes installés respectivement en 1993 et 1998. C’est au beau milieu de ce ce paysage vallonné de forêts et de prairies que trône le chai rouge écarlate du domaine. Pas de doutes une fois sur place : vous êtes bien au bon endroit !

Mais avant d’en arriver là, Florent a connu des horizons lointains et des chemins de traverse. Et c’est dans le Val de Loire qu’il commence son parcours, d’abord avec un BEP « Vigne et vin » à Cosne-Cours-sur-Loire (près de Sancerre) et l’obtention de son bac pro, puis à Fondettes (37) au lycée Agrocampus d’où il ressort avec un BTS « Vigne et vin » en 2005.

Son diplôme en poche, il participe alors aux vendanges du domaine Vincent Carême à Vouvray, où il va travailler jusqu’en 2007. Durant cette période, Florent Barichard profite des périodes creuses de l’hiver français pour aller voir ce qui se fait ailleurs dans l’autre hémisphère. Il part notamment en Afrique du Sud en janvier 2006 vendanger et vinifier au domaine Neil Ellis. Puis, l’hiver suivant l’amène en Nouvelle-Zélande. Des expériences enrichissantes qui lui permettent de découvrir d’autres façons de travailler et d’appréhender le monde du vin : « Ça m’a permis de voir des choses intéressantes que j’ai pu adapter ici à mon installation, et d’autres qui ne me correspondaient pas ».  Une façon de mieux définir la direction dans laquelle il voulait aller avant de se lancer plus avant.

Et c’est finalement en 2008, après quelques vendanges dans des domaines tourangeaux (chez Damien Delecheneau – AOC Montlouis ou François Pinon – AOC Vouvray) qu’il retourne “au pays” travailler la vigne (dont les raisins alimentent alors la cave coopérative de Saint-Pourçain) avec son oncle et sa tante, Éric et Valérie Nesson, le temps de préparer son installation en 2013.

Vignes - domaine les Terres d'Ocre

Vignes autour du chai

In mano veritas

 « À la création du domaine en 2013, le domaine comptait 8,5 ha de vignes pour aujourd’hui s’étendre sur 14 ha, répartis sur les trois principaux terroirs de Saint-Pourçain ».

Les vignes du domaine des Terres d’Ocre se divisent à part égales entre blanc et rouge. Les cépages cultivés sont le gamay (4,30 ha) et le pinot noir (3,30 ha) pour les vins rouges et rosés. Les blancs sont quant à eux élaborés à partir de chardonnay (3,90 ha) et du cépage local tressallier (2,50 ha).

Le domaine pratique depuis plusieurs années une culture « dans l’esprit bio et biodynamique » et est actuellement en cours de conversion pour l’obtention du label bio depuis 2017 (la période de conversion dure 3 ans).

De ce fait, les vendanges sont 100 % manuelles. « Je suis un convaincu de ce moyen de vendanges qui respecte vraiment le raisin. On travaille avec une équipe de 15 à 25 vendangeurs. On emmène deux rangs à la fois. Les vendangeurs remplissent leurs seaux et les vident ensuite sous le contrôle d’Éric, mon oncle, qui veille à la qualité du raisin. Donc pour les blancs, le tri se fait essentiellement à la vigne. Pour les rouge, en plus du tri à la vigne, un second tri est effectué en cave pour une qualité de raisin optimum ».

Les Terres d'Ocre - vignes

Parcelle de chardonnay

Tressallier

Fleur de tressallier

Une gamme complète et cohérente

À l’image d’une nouvelle génération de vignerons, Florent attache une grande importance à la communication et l’aspect graphique des vins. Ainsi, la gamme et l’habillage des vins du domaine viennent d’être repensés pour former trois catégories :

  • Les vins d’appellation Saint-Pourçain : simples et fruités, faciles à boire. Ce sont les cuvées Instant T, composées de raisins issus de différentes parcelles et déclinée en rouge (gamay, pinot noir) , rosé (100% gamay) et blanc (chardonnay et tressallier).
  • Les vins de cépages : un rouge 100% pinot noir (Les Cailloux), et un blanc (Tressallier) issu exclusivement de ce fameux cépage local, le Sacy, originaire de Bourgogne et qui aurait pris son nom local Tressalier après avoir traversé l’Allier (trans-Allier). Ces deux cuvées de mono-cépage ne rentrant pas dans le cahier des charges de l’appellation Saint-Pourçain, elle sont présentées en IGP Val de Loire.
  • Les Saint-Pourçain parcellaires : vins de gastronomie, plus complexes, élevés en fûts, avec un plus grand potentiel de garde. Il s’agit du rouge Les Ardelles (70% gamay, 30% pinot noir) et du blanc Les Gravoches (70% chardonnay, 30% Tressallier).

Le cépage tressallier

Indissociable de l’appellation Saint-Pourçain, le tressallier est utilisé en assemblage uniquement à hauteur de 40% maximum. En attendant une modification du cahier des charges de l’AOC afin de pouvoir vinifier des cuvées 100% tressallier, certains vignerons ont pris les devants en commercialisant leur vin de mono-cépage sous l’IGP Val de Loire.

Les Terres d'Ocre - Cuve et futs

Cuve béton / futs de 400 litres

Des vins bien élevés

Les cuvées, Instant T (9 mois d’élevage) et Les Cailloux (12 mois d’élevage) sont élevés en cuve béton « contenant neutre en terme d’apport aromatique et de bonne qualité au niveau micro-oxygénation, ce qui permet un vieillissement modéré en gardant de la fraîcheur ». Les Gravoches et Les Ardelles connaissent un élevage sous bois, en fûts de chêne de 400 litres, pendant respectivement 18 et 24 mois. Des essais d’élevage en amphores en terre cuite pour les gamay et en grès pour le tressallier sont même en cours actuellement… À suivre.

Florent Barichard - dégustation au domaine

Dégustation au domaine avec Florent Barichard

Les Terres d'Ocre - Élevage du Tressallier dans une amphore de grès

Élevage du tressallier en amphore de grès

On est bien dans la Loire !

Il se dégage de la dégustation une impression générale de fraîcheur, de gourmandise, et une belle maitrise des vins. Les cuvées Instan T sont rondes, fruitées mais sans aucune lourdeur, avec une acidité maitrisée qui vient équilibrer le tout. Il en est de même pour les vins de cépage, qui font part d’une grande pureté de fruit et présentent un profil franc et aérien. Quand aux cuvées de garde, leur touche boisée non ostentatoire leur confère un profil plus sophistiqué et concentré mais sans excès, dans l’équilibre et la finesse. On est bien ici dans l’esprit des vins ligériens, qui tient tant à cœur au jeune vigneron, qui résume les vins de Loire en trois mots « fraîcheur, diversité et accessibilité » (voir vidéo ci-dessous).

Des vins d’avenir

Du vin de copains à boire à l’apéritif au vin de gastronomie pour accompagner un beau plat, nul doute que chacun trouvera son bonheur dans les vins des Terres d’Ocre. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si de plus en plus de sommeliers et cavistes proposent des vins issus d’AOC méconnues, à des clients toujours à l’affût de nouveautés et de découvertes, un peu lassés des appellations classiques et qui ne demandent qu’à être surpris.

« Pour moi, la Loire est vraiment le vignoble de demain… » déclare Florent Barichard. Et nous, au MVL, on acquiesce !